mardi 24 avril 2012

83.Le Bain Maure

Je me souviens du bain maure de Saint Démon.
Je me souviens qu'on entrait, d'abord dans une salle couverte de faïences bleues, autour de laquelle, longeant les murs, des bancs maçonnés.
Je me souviens ensuite de la vapeur qui emplissait l'espace d'une pièce voûe et entourait les corps dans la pénombre.
Je me souviens des petites vasques semi-circulaires et de l'eau fraîche qui coulait des robinets de cuivre à notre hauteur.
Je me souviens du savon de Marseille, du vinaigre, du gant de crin, des récipients de cuivre, des peignes en os et des petites casseroles.
Je me souviens des flaques et des glissades dans l'eau savonneuse.
Je me souviens de l'eau fraîche qui coulait sur nos corps brûlants.
Je me souviens du moment où il fallait cesser de jouer pour être sérieusement lavées.
C'est la tante Semia qui lavait le mieux. Elle commençait par le savon de Marseille, une bonne couche partout, y compris la tête.
Je me souviens du gant de coton qu'il fallait tenir des deux mains, bien appliqué devant les yeux bien fermés.
La tante Semia était, dans le lavage, précise et méthodique, après le savonnage, le frottage, et lève le bras et puis l'autre et lève le pied.
Je me souviens qu'installés tour à tour entre les jambes de Semia, nous faisions le dos rond, bras repliés, comme dans le ventre d'une mère.
Je me souviens que Semia nous apprenait le frottage qui rendait propre comme un sou neuf, qui faisait la peau parfaitement douce.

Je me souviens qu'apparaissait, alors, sous nos mains, la preuve même que nous avions é jusque là sans le voir, "sales comme des peignes".
Je me souviens que Semia donnait à chacun un morceau du savon de Marseille coupé au couteau, et qu'elle l'adaptait à la taille de nos mains.
Je me souviens qu'il fallait faire le "décrassage" à main nue avant tout savonnage, dans la vapeur qui avait amolli nos peaux.

(à suivre...)
LB

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